Les puissances mondiales du XX siècle – URSS et Etats-Unis – menèrent d’arrache-pied l’étude de l’espace assujettie à des fins militaires. Ils lancèrent des projets parallèles voulant arriver à des concepts d’appareils censés devenir l’alliage des avions (atterrissage et décollage non-assistés, utilisation multiple) et des technologies les plus avancées des fusées spatiales (vitesse hypersonique et accès à l’orbite terrestre).
Il est facile à comprendre les raisons de la création d’un tel concept. Quel rêve que d’avoir une arme de classe spatiale décollant à partir d’une piste d’atterrissage classique mais agissant à une altitude inaccessible pour la défense aérienne et à une vitesse garantissant l’atteinte de n’importe quelle cible se trouvant à des milliers des kilomètres, ex-centrée par rapport à la ligne de front, avec un retour à la base en quelques heures ! L’appareil devait répondre à la fois à toutes les caractéristiques pré-citées, à savoir : vitesse cosmique, rayon d’action élargi, sortie dans l’espace.
Le ciel inaccessible
Plus les scientifiques s’évertuaient d’atteindre ces exigences contradictoires, moins le résultat était sûr. Les recherches portaient à la fois sur le propulseur, les matériaux de la coque, la structure de l’appareil aussi bien que les caractéristiques du combustible qui devait en remplir les réservoirs.
C’est que le propulseur de cet avion spatial devait pouvoir fonctionner aussi bien dans l’atmosphère terrestre que dans le vide spatial. En même temps, cela répondait, en fait, à 2 modèles de moteur complètement différents par leur principes de base. D’une part, vous avez les moteurs atmosphériques qui usent de l’air pompé dans leur chambre de combustion en le mélangeant au combustible et aux produits de la réaction chimique générés par l’oxygène consommé. La vitesse maximale de ce type de moteurs se chiffre à 3-5 Mach c’est-à-dire plus de 3.000 km/heure. A titre d’exemple, on peut mentionner que les drones de reconnaissance Lockheed D-2 de la société «Lockheed Martin» en sont dotés. Cependant, sont beaucoup plus courants les moteurs double flux dans les turboréacteurs, turboprops ou turbo-ventilateurs. La vitesse de ces appareils est localisé généralement entre 1 et 3 Mach avec un rendement de l’ordre de 70-80%. Tout appareil moderne – fabriqué en Russie ou à l’étranger, militaire ou civil – n’utilise que ce type d’engin.
D’autre part, les propulseurs des fusées transforment en énergie cinétique le produit de l’incinération de leur combustible et de l’oxydant généré à partir de l’oxygène embarqué. (Le propulseur fait accéder la fusée à l’orbite où le vide règne et l’air est absent). Le prorata est tel que la quantité d’oxydant doit être par plusieurs fois supérieure au combustible.
En même temps, le poids des propulseurs des fusées jetables (il n’en existe pas d’autres actuellement) peut être de l’ordre des centaines, voire des milliers de tonnes. Ce qui veut dire qu’un bombardier cosmique avec les propulseurs de ce type ne serait jamais rentable parce que par trop onéreux et avec un rayon d’action limité.
Les stratoplanes sinon rien
Les Etats-Unis ont été les premiers à avoir testé les stratoplanes. Leur appareil reçut pour nom de code X-15 et fut mis à point par la société NAA (North American Aviation). Il effectua 200 heures de vol à une altitude dépassant parfois 100 km, soit suborbitale. Il est cependant à noter que la durée de ces vols ne dépassait pas 10-15 minutes, mais à une vitesse de l’ordre de 6,7 Mach. Le prototype décollait du dos du bombardier B-52, à une altitude de 15 km.
Vint après le programme X-20 Dyna Soar. Du temps du X-15, les forces aériennes américaines testaient leur capacité d’atteindre l’altitude de 100 km, voire plus. Et maintenant les ingénieurs US, pleins d’allant, ont décidé de créer un bombardier spatial à part entière.
La réalisation du concept prit 10 ans, soit entre 1953 et 1964. Elle comprenait une multitude de tests à réaliser, des vols à plafond suborbital et les vols orbitaux. A la différence du X-15, le X-20 partait à l’aide d’une fusée «Titan». Cependant, malgré les dépenses pharaoniques encourues, le programme a été gelé par le chef du Ministère de la Défense des Etats-Unis Robert McNamara. Le projet «Gemini» fut considéré comme prioritaire. Ce projet généra après le fameux «Apollo», bien connu par les ex-Soviétiques grâce à son amarrage orbital avec la station soviétique «Soyuz». L’opération reçut pour nom de code «Soyuz-Apollo».
10 années encore s’écoulèrent. C’est dans les années 80 que le «grand spécialiste de communication» Ronald Reagan devint président. L’espace orbital était dorénavant occupé non seulement par les appareils soviétiques, mais aussi par les navettes spatiales en partance du cap Canaveral. Le complexe Space Shuttle comprenait une navette habitée, un grand réservoir de combustible et deux propulseurs à combustible solide qui permettaient à la navette de gagner l’altitude orbitale.
L’URSS travaillait en parallèle avec les Etats-Unis. Mais la seule navette spatiale à usage multiple lancée par les Soviétiques fut le «Bourane». Son trait caractéristique était une robotisation complète, sans assistance de pilote. Si cela se passait maintenant, on le reconnaîtrait automatiquement pour drone ou vaisseau spatial autonome robotisé. Quoi qu’il en soit, il est à noter que le vol du «Bourane» fut très en avance sur son époque.
Avant que l’on ne passe au stade moderne, il faut noter que le «Bourane» fut initialement conçu comme un modèle militaire. Il devait représenter la réponse russe au programme du Space Shuttle américain que l’URSS appréhendait comme un programme strictement militaire (bien qu’il n’existe aucune référence à son usage militaire dans aucun des documents de la NASA ou des établissements militaires américains comme il n’existe aucune référence à une telle utilisation dans aucun livre des mémoires des participants à ce programme).
Espace militarisé
La fin du XX siècle fut marqué par l’implosion de l’URSS et la divulgation des secrets des programmes spatiaux à travers les pays du monde. Beaucoup de pays décidèrent alors de démarrer leur propre programme spatial – Grande-Bretagne, Japon, Inde, Chine, etc. Cependant, la nouvelle percée militaire fut de nouveau effectuée par les Etats-Unis.
Ce fut du temps de la présidence de George W. Bush. Le ministre de la défense d’alors Donald Rumsfeld adopta un plan ambitieux du réarmement des forces armées nationales. Les forces spatiales en prirent aussi un coup. Le programme de supériorité de l’armée américaine signée Rumsfeld devait délivrer des drones de combat jusqu’au point de saturation, des moyens de transmission et de gestion ultra-sophistiqués. Vinrent s’y greffer les programmes conventionnels de l’amélioration des armes classiques. Tout ça a permis de mettre à contribution l’expérience du «Bourane».
A ce moment, tous les programmes de l’élaboration du concept d’un bombardier spatial ont été définitivement gelés. Le président Clinton recanalisa les fonds destinés à ce programme dans le programme «X» de la NASA.
Les ingénieurs de la NASA reçurent pour mot d’ordre d’améliorer les données techniques, à savoir le rayon d’action, l’altitude et l’autonomie de la navette spatiale. En 2001, Rumsfeld ordonna aux concepteurs de mettre au point le «vaisseau militaire suborbital» en vue d’une frappe-éclair. Le temps de l’opération devait être entre 30 et 90 minutes.
Rien d’étonnant que les journalistes qui mirent la main dessus, commencèrent à discourir sur une véritable flotte de bombardiers spatiaux américains en chantier. Les militaires ne pipèrent mot.
Le prototype à l’essai de cette période fut baptisé le X-37. A son tour, il aurait servi de base pour les nouvelles navettes spatiales classées secret défense et remplissant des missions spéciales dans l’espace orbital de la Terre…
Pravda.ru
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