Depuis minuit, les entreprises soumises au droit ukrainien fonctionnant sur le territoire des républiques de Donetsk et Lugansk qui ont refusé de s’enregistrer dans ces territoires passent sous administration provisoire. Avec la reconnaissance temporaire des passeports de ces républiques par la Russie, c’est une mesure de plus due au blocus énergétique décidé par Kiev qui tend à éloigner encore plus le Donbass de l’Ukraine et rendre leur fracture définitive.
Depuis plus d’un mois, les radicaux ukrainiens ont installé un blocus énergétique autour du Donbass. Etrangement, alors que les autorités ukrainiennes déclarent que ce blocus porte atteinte aux intérêts de l’Ukraine avant tout, puisqu’elle est dépendante du charbon de cette région, aucune mesure n’est prise pour y mettre fin. Avakov, le ministre de l’intérieur justifie son inaction par une soi-disant absence d’ordre d’agir et le Premier ministre Groïsman propose aux personnes touchées par le blocus d’aller elles-mêmes discuter avec les radicaux. Pour leur part, les radicaux se cachent au milieu de retraités, ces “pacifistes” devant les protéger de leur corps face à la police. Ce schéma rappelle celui du Maîdan.
La première réaction à ce blocus fut la reconnaissance temporaire par la Russie des passeports et documents délivrés par les autorités de DNR et LNR à leurs ressortissants, afin, justement de les désenclaver (voir notre article ici) en attendant l’application des accords de Minsk.
Suite à ce blocus certaines usines métallurgiques étaient sur le point de fermer, des milliers d’emplois étaient en jeu. Dans un premier temps, la Russie a livré le charbon nécessaire au fonctionnement de ces usines, puisque celui produit dans la région ne peut être utilisé à cette fin. Elle a ainsi permis d’éviter une énorme crise sociale et humanitaire.
Lundi, les dirigeants des républiques de Donetsk et Lugansk ont lancé un ultimatum:
Les entreprises ukrainiennes fonctionnant sur le territoire des républiques de Donetsk et Lugansk ont eu jusqu’au 1er mars pour s’enregistrer fiscalement dans le Donbass et entrer dans la juridiction des républiques, ce qui implique de ne plus payer leurs impôts à Kiev, mais localement. Dans le cas contraire, ces entreprises passeront sous administration provisoire, sans qu’une expropriation formelle ne soit toutefois réalisée.
Selon le ministère ukrainien pour les territoires temporairement occupés, tout business man qui quitterait la juridiction ukrainienne mettrait en jeu sa responsabilité pénale pour terrorisme financier.
Il faut dire que malgré les déclarations de patriotisme économique, les autorités ukrainiennes continuaient de commercer avec le Donbass puisque la ligne de front passe au milieu du territoire qui aurait pu autrefois fonctionner en circuit fermé. Les usines et les mines de charbon sont de part et d’autre de la ligne de front et ne peuvent fonctionner les unes sans les autres. C’est aussi une des conséquences des accords de Minsk, une sorte de “garantie” de dépendance des républiques de Donestk et Lugansk.
Si la situation est celle d’une guerre civile, ce type de décision est politiquement logique. Mais elle oblige à réorienter les flux commerciaux et budgétaires. C’est pourquoi les autorités locales affirment s’être préparées à cette éventualité depuis un an. Nous ne sommes pas dans le cadre d’une réaction émotionnelle, mais dans celui d’un changement de stratégie politique. Elles ont mis ainsi en place des structures composées de représentants des ouvriers de ces entreprises, des syndicats professionnels, de députés locaux et d’ONG locales. Ces organes ont pour mission d’aider les entreprises à passer sous juridiction de DNR et LNR, à réorienter leur production, à développer leurs activités commerciales avec d’autres partenaires, notamment en Russie et en Chine.
Cette décision porte un coup très important aux oligarques locaux, qui généralement ne soutiennent pas les autorités locales: la politique étant mauvaise pour le business. Par exemple, l’oligarque Akhmetov possède dans le Donbass 47 entreprises (des usines métallurgiques, des mines etc) et emploie environ 120 000 personnes. S’il verse ses impôts dans le Donbass et non en Ukraine, le budget ukrainien va perdre environ 2,5 à 3 milliards de gryvnia, ce qui sera autant de versé dans le budget des républiques.
Pour autant, tout n’est pas simple. Certains hommes d’affaires refusent cette mise sous administration provisoire pour raison politique, qui risque de provoquer leur faillite personnelle. Les autorités locales ont promis de ne pas toucher aux emplois et de tenter de relancer les entreprises qui ont dû fermer suite au conflit. Elles se donnent une période transitoire de 2 mois environ.
La transition ne va pas être simple, mais elle est d’une importance considérable pour les autorités locales, car si le pari est gagné, elles renforceront leur autonomie budgétaire et donc leur poids politique. Pour Kiev, c’est une très mauvaise nouvelle, car la politique menée par l’Ukraine semble conduire vers une inéluctable séparation de ces territoires. En ce qui concerne la Russie, elle est dans une situation délicate. D’une part, elle est obligée, au minimum moralement, de soutenir, notamment économiquement, ces territoires qui ne pourront évidemment réussir seuls leur transition. D’autre part, cela sera perçu sur la scène internationale comme une violation de plus des accords de Minsk. Mais ces accords de Minsk existent-ils encore?
Karine Bechet-Golovko
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