C’est avec une grande émotion que j’ai eu l’honneur de rencontrer les juristes et avocats Alexei Jigouline chef de la commission du Génocide dans le Donbass et son assistant Vitali Galakhov. Cette commission a été formée très tôt alors qu’il apparaissait nécessaire de rassembler vite les preuves, documents et témoignages dans le but avéré de pouvoir un jour porter devant un tribunal international et/ou ukrainien toutes ces accusations pour faire traduire en justice les criminels. Ce devoir est celui auquel Messieurs Jigouline et Galakhov se sont attelés. C’est un énorme travail, des milliers de documents ont déjà été rassemblés et formalisés mais d’énormes problèmes sont en vue car l’isolement international des deux républiques autoproclamées de Donetsk et Lougansk rend difficile l’aboutissement de ce travail.
Avec une équipe très faible d’une demi-douzaine de collègues, la commission fonctionne désormais à plein régime. Chaque bombardement, chaque crime de guerre, exaction, destruction est enregistré. Tous les témoins sont interrogés minutieusement par un ou plusieurs spécialistes en criminalité, des juristes confirmés. Un formulaire a été créé uniquement pour établir dans les formes chaque fait, les victimes sont identifiées et comptabilisées, chaque destruction est référencée, habitation par habitation avec à l’appui des photos, des vidéos et même l’ensemble des passeports, documents, plans des maisons et logements pour attester dans le futur des crimes commis. Ce travail gigantesque a déjà demandé de nombreux efforts. Des milliers de documents sont déjà établis, plus de 4 500 se trouvaient déjà dans les archives de la commission qui a un travail énorme d’inventaire et de stockage à faire. Il est difficile pour cette équipe de réaliser tout ce travail avec de si faibles moyens (notamment financiers). Toutefois l’expérience d’Alexei Jigouline et de Vitali Galakhov est très précieuse. Les preuves ne sont pas constituées seulement par des documents et des procès-verbaux mais aussi par des objets, reliquats d’obus, de munitions, armes ou autre chose utile aux témoignages. Ceux-ci sont recoupés systématiquement, le voisinage est interrogé, il est procédé à l’identification de chacun, avec signature et contrôle des témoignages par plusieurs témoins. Le tout constitue déjà une base d’archives déjà énorme et appelée à grossir au vu des violations sans fin des accords de Minsk par l’Armée ukrainienne.
Toutefois ce travail reste pour l’instant partiellement stérile, car le but poursuivi et un jour de poursuivre en justice les criminels de guerre et les responsables politiques devant un tribunal international comme celui de la Haye, en Ukraine ou en Europe. Les problèmes ici commencent à partir du moment où la communauté occidentale, particulièrement d’ailleurs la France et l’Allemagne désinforment systématiquement les populations sur la situation dans le Donbass. Le gouvernement français prend donc une part active dans le camouflage des crimes de guerre en oubliant de préciser que la guerre se déroulant sur le territoire des insurgés du Donbass, les victimes civiles sont à presque 100 % des habitants et russophones de l’Est de l’Ukraine. L’Armée ukrainienne ayant lancé plusieurs offensives depuis le mois de juin 2014, ce sont les populations du Donbass qui sont martyrisées, sans compter les destructions des habitations, le blocus bancaire, humanitaire et alimentaire du Donbass organisé avec l’aide des Européens ou passé sous silence pour des raisons politiques. Il faudra bien pourtant que les criminels de guerre, les politiques responsables des meurtres, des enlèvements, des viols, des bombardements aveugles, des massacres, des pillages et des exécutions arbitraires dont ont été victimes déjà de nombreuses personnes atterrissent un jour devant un tribunal similaire à celui de Nuremberg. Car au vu du nombre des victimes, nous en sommes déjà là. Interrogé sur ce point Alexeï Jigouline indique qu’il faut multiplier par trois les chiffres donnés par les Européens (6 000 civils tués) sans parler des blessés, des invalides et des estropiés. Selon lui «Il est pour l’instant impossible de donner un chiffre exact, les comptages sont en court».
La commission des crimes de guerre de Donetsk, lance donc un appel à l’aide et au devoir à tous les juristes français ou européens, du monde entier pour aider à ce que tous ces documents soient envoyés à un tribunal autorisé et compétent. Le blocus a détruit le fonctionnement de la poste dans la zone du Donbass, pour l’instant les documents sont conservés sur place, des contacts ont été pris en Russie mais il est difficile à travers elle de communiquer sur les crimes de guerre. La commission espère donc ouvrir des contacts particulièrement avec des partis politiques, des associations d’avocats ou de juristes, le parlement européen pour que tous ces témoignages, documents et listes de victimes puissent arriver à bon port. Le scandale est absolu lorsque l’on pense que le devoir de tout être humain, comme ce fut le cas d’ailleurs après la Seconde Guerre mondiale est de dénoncer et de combattre toutes les formes génocidaires ou populicides dans le monde. Il ne semble pas que pour l’instant le Président Hollande et d’ailleurs aucun politicien ou presque en France ou en Europe n’est pris la mesure de l’importance des destructions et crimes commis par l’Ukraine dans le Donbass d’ailleurs souvent au nom de la «démocratie» et même de l’Union européenne et de la future intégration de l’Ukraine dans le paradis européen. C’est avec tristesse que j’imagine les difficultés que cette commission va rencontrer, mais c’est avec force que j’écris ces lignes et espère trouver en France quelques têtes qui fonctionnent encore dans le corps juridique, pour que ces crimes ne restent pas impunis et également que cette Ukraine dans l’Europe ne soit pas construite sur les milliers de corps de gens innocents qui n’avaient pour espoir que de vivre libre et selon leurs vœux, qui n’étaient pas forcément ceux de quelques idéologues démocrates prônant par la pensée unique un monde idéal ressemblant de plus en plus à une authentique et terrible dictature… qui cache son nom.
Laurent Brayard
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