Un matin, en préparant mon thé dans ma cuisine, je parcourais comme tous les jours les titres du fil d’actualité ukrainienne. Rien de spécial, que du délire quotidien habituel. Jusqu’à ce que des mots comme « ministère des Affaires étrangères » (de l’Ukraine), « dément », « mythes » accrochent mon regard en me mettant en alerte. Qu’a-t-il bien pu arriver d’aussi extraordinaire pour qu’un ministère ou un homme politique du gouvernement ukrainien actuel trouve le moyen de démentir quoique ce soit ?
Tandis que là ce n’était ni plus, ni moins, que le représentant du ministère des Affaires étrangères, monsieur Kouleba en personne, qui démentait le mythe au sujet du referendum aux Pays-Bas sur l’association entre l’UE et l’Ukraine. Après avoir lu l’article, je suis arrivé à la conclusion que le gouvernement ukrainien persiste à vouloir transformer ces citoyens en vrais moutons incapables de réfléchir. Ainsi, je vous propose ici de regarder point par point le raisonnement du monsieur l’ambassadeur itinérant du ministère des Affaires étrangères de l’Ukraine dans son effort de « démystification ».
Allons-y :
- “Pour un Hollandais qui fait parti de ces 55,5% (les personnes ayant l’intention de voter « contre » – réd.), voter contre l’Accord d’association, revient à monter à Bruxelles une fois de plus qui est celui qui dicte les règles du jeu. Il lui est donc parfaitement égal qu’un tel vote mette en suspens la question de l’unicité et de l’efficacité de l’UE. Il lui est aussi bien égal ce que son vote « contre » puisse avoir comme répercussion sur le sort d’un million d’Ukrainiens quelque part dans l’Est. Les organisateurs du referendum visent avant tout leur propre gouvernement et l’Union Européenne. L’Ukraine s’est retrouvée au mauvais endroit et au mauvais moment. Cela arrive malheureusement ».
Evidemment, que cela arrive. Surtout si on oublie de lire le texte de l’accord et le signe en aveugle suivant les indications des « tuteurs » étasuniens. Mais il y a bien un point dans tout ça, sur lequel il serait difficile de ne pas donner la raison à monsieur Kouleba : un européen lambda n’a que peu à faire de la répercussion que son vote pourrait avoir sur les Ukrainiens. Cela lui a toujours été égal, c’est le cas aujourd’hui et ce sera ainsi à l’avenir. Ils ont déjà leurs problèmes pardessus la tête, alors prendre à charge ces miteux en plus … que nenni !
- “Il est peu probable que ce soit le Kremlin qui s’était mis à jouer au referendum, mais il est certain que le Kremlin fait parti du jeu. Nous ne voyons pas tous les flux monétaires qui circulent, mais voyons les opposants de l’accord reproduire presque à la lettre les clichés russes ».
Au fait, vous vous attendiez à quoi ? La vérité sert à ça, qu’on puisse la reproduire indéfiniment sans y changer quoi que ce soit. C’est quand on ment, on peut resservir la même information en la présentant sous un angle différent. Mais lorsqu’on dit la vérité, elle reste la même. Or, on a bien dit que l’association aura des effets désastreux sur l’économie de l’Ukraine. Et c’est ce qu’on voit in fine.
- “Grâce à la législation démocratique des Pays-Bas, monsieur le Kremlin pourrait aller plus loin et soutenir maintenant officiellement avec de l’argent les forces locales qui font la campagne contre l’association. Mais ce n’est pas dans le style du Kremlin. Son style c’est de la provocation informationnelle et de la triche. Nous en verrons encore beaucoup d’ici le 6 avril. “
On ne sautait pas si bien dire. Justement, il n’est pas du tout dans le style du Kremlin de se mêler des affaires internes des Etats souverains en mettant les pieds dans le plat. Et si on poursuit le raisonnement de l’auteur de l’article, comment devrons-nous appeler ce qui s’était passé en 2013 en Ukraine ? Quand on évoquait ouvertement les sommes dépensées par le Département de l’Etat américain pour soutenir le Maïdan et lorsque Victoria Nuland sillonnait Kiev pour distribuer ses fameuses cookies ? Alors que le Kremlin, quel filou, a osé juste fournir les informations aux Néerlandais (quant aux soi-disant provocations, j’ai vraiment dû mal à comprendre ce qu’on entend par là).
- «Les auteurs critiquent leur gouvernement et l’Union Européenne à cause de l’implémentation provisoire de l’accord et exigent sa suspension jusqu’au moment ou la volonté du peuple sera divulguée».
Comment un tel paragraphe a réussi à échapper à l’attention des Ukrainiens reste un mystère. Je vous invite à le relire avec attention. Rien ne vous dérange ?
- “Le rôle de l’Ukraine pour les 10 semaines à venir est simple : promouvoir avec conviction sa culture, les opportunités business qui s’ouvrent aux Hollandais, les changements qu’elle a réussis au cours de son histoire et, bien naturellement, montrer le réel progrès dans la mise en œuvre de l’Accord d’association en insistant sur la façon dont celui-ci transforme la pays. Ce rôle doit être tenu par toutes les personnes concernées de sorte à ce que le front unique de communication soit maintenu et à ce qu’on parvient à toucher le public le plus large » !
Du point de vue de la culture, tout va bien. Ca frôle même la perfection. Ce ne sont pas les preuves qui manquent, ne serait-ce que du côté de ce même ministère des Affaires étrangères :
Le ministre des Affaires étrangères d’un Etat qui recourt aux obscénités en public en parlant d’un autre Etat, vous en dîtes quoi, chers européens ? Je dirais que le niveau culturel est au top. Quant aux opportunités business, vous pouvez vous adresser à monsieur Kolomoïsky qui se fera un plaisir de vous expliquer clairement comment prendre la procession d’un oblast tout entier ou lancer une OPA hostile sur une entreprise que vous avez en vue. Quant au PIB du pays, celui-ci ne cesse de croitre, pardon, d’être en chute libre. Et pour ce qui est du succès en matière des changements, il est incontestable ! Pas de retraites, pas de salaires, et les tarifs pour les charges communales qui ont percé le plafond. Le nombre de hold-up à Kiev (la capitale) courant janvier à dépassé les chiffres pour l’ensemble de l’an passé et on ne les fait plus pour de l’argent : les gens se font piquer de la nourriture car leur pairs n’ont rien à manger !
- “En ce qui concerne la suppression des visas Schengen pour les Ukrainiens, c’est une histoire à part avec laquelle le referendum n’a rien à voir. Rien n’est perdu. Un fois de plus, tout ne fait que commencer».
Visiblement, le gouvernement ukrainien prévoit de continuer à embobiner son peuple par ces histoires de suppression des visas pendant encore un bon bout de temps. Quoique même dans ce texte il est sous-entendu que ses promesses seront vaines, mais qu’elles seront encore nombreuses.
Bien que tout cela me faisait rire, j’éprouvais aussi de la pitié pour tous ces gens qui lisant ce que, n’étant pas ni psychiatre, ni psychanalyste de métier, j’aurai du mal à qualifier, continuent à soutenir le gouvernement ukrainien et croire en avenir radieux.
Gueorgui Morozov, rédacteur en chef de Novorossia Today
Traduit depuis le russe par Svetlana Kissileva
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