Dans tous les pays, la propagande est contrôlée par l’Etat et représente ce qui plaît à l’Etat. Or, ce qui plaît à l’Etat, c’est votre disposition à accomplir un meurtre lorsqu’on vous l’ordonne.
Bertrand Russell
N’est-ce charmant que les nazis arrivent toujours à intégrer dans leur propagande le mot «liberté».
Stieg Larsson
Mettez-moi les médias en ma disposition et je vous transforme n’importe quel peuple en un troupeau de cochons!
Joseph Goebbels
On peut être d’accord avec ces citations ou les rejeter, mais il ne sert à rien nier la thèse que l’espace informationnel au sein d’un Etat (la propagande, pour faire simple) se trouve sous contrôle de son gouvernement. C’est ainsi que les choses doivent être, l’Etat doit promouvoir sa politique auprès des masses, pour lui assurer le soutien de la population. La politique aussi bien extérieure qu’intérieure ne peut pas avoir de résultats probants sans être approuvée d’en bas. D’une marnière ou d’une autre, on peut déceler dans le travail de n’importe quel média public une orientation qui a pour but d’accomplir les tâches posées par les autorités politiques et idéologiques du pays.
Il est donc naturel que l’Etat utilise ses outils législatifs et administratifs pour protéger sa population d’une influence «extérieure». En formant des bases puissantes sur lesquelles est construite cette défense qui a tant manqué à notre pays les 30 dernières années. Un défaut de préparation et des méthodes pour lutter contre le «beau packaging» de l’Occident ainsi que le public assoiffé ont contribué à la destruction de l’URSS. Plus tard, grâce à ses méthodes de propagande de ,ombreuses révolutions de couleur ont été réalisée. Dont le dernier exemple, nous voyons tous les jours, soit depuis les écrans de la télévision ou des ordinateurs connectés à l’internet, ou les entendons derrière la fenêtre (NDT : l’auteur parle de l’Ukraine du point de vue d’un Donbassien).
Maintenant, en ce qui concerne les changements à venir…
Tous les ans, le Congrès des USA adopte le National Defense Authorization Act, la loi qui sert à établir le budget et les dépenses du Département de la Défense des États-Unis pour une année fiscale à venir. D’une année à une autre, on y intègre de différents amendements comme, par exemple, la loi Magnitski, la loi qui autorise une détention pour une durée indéterminée des citoyens, la loi sur un «octroi d’une aide financière à l’Ukraine». Tous ces documents rentrent dans le National Defense Authorization Act.
Cette année, on a adopté en catimini dans l’ensemble des documents l’amendement qui supprime l’organe qui s’appelle le Broadcasting Board of Governors. Comme il est expliqué sur son site officiel, cette agence a pour but de «fournir une actualité et des informations objectives et exactes à des publics cibles stratégiques dans des pays étrangers… et servir d’exemple concret des médias libres et professionnels pour des pays qui ne disposent pas de sources indépendantes d’information». Voici la liste des médias qui dépendent de cette agence :
- La Voix de l’Amérique
- La Radio Free Europe / la Radio Liberty qui incluent la Radio Farda, la Radio Azadi et la Radio Mashaal.
- The Middle East Broadcasting Networks qui inclue la companie télévisée Al-Hurra et la Radio Sawa qui diffusent les infos sur le Proche Orient et l’Afrique du Nord.
- La Radio Free Asia
- La Radio et la TV Marti (Радио и телевидение Марти (la retransmission vers le Cuba)
En 2013, l’audience totale des médias contrôlés par le Broadcasting Board of Governors (radio, télé et Internet) a atteint 206 millions de personnes, par rapport à 175 millions en 2012.
Le financement est accordé par le Congrès des USA à la demande de l’agence selon le projet du budget pour l’année suivant que celui-ci lui soumet. En 2017 on prévoit dégager 777,8 millions de dollars. C’est presque 30 million d’euros de plus par rapport à l’année en cours.
En 2015, le PDG de l’agence Andrew Lack a déclaré dans son interview à New York Times que les Etats Unis «doivent faire face à de nombreux défis de la part des entités comme Russia Today qui cherchent à imposer leur point de vue, au même titre que l’Etat Islamique dans le Moyen Orient et les groupes comme Boko Haram». Jen Psaki a réussi à se distancer par rapport à ces déclarations en permettant à la Maison Blanche de ne pas en prendre la responsabilité «Est-ce les autorités des USA les classeraient dans la même catégorie ? Non, nous ne le ferions pas» ; selon elle, l’agence représente un organe fédéral indépendant, ainsi les déclarations faites par le PDG du Board ne peuvent pas être considérées comme la position de Washington. Curieux comme logique, mais c’est ainsi. Mais dans le projet du budget pour l’année 2017 il y a un poste de dépenses prioritaires :
Comme on le voit, les relations avec la jeune audience «qui est impactée par la pression de la part de la Russie» sont placées au même niveau que «les pressions des groupes extrémistes comme l’EI».
Plus loin dans le texte, on voit qu’on dégage certains moyens financiers (10 millions de dollars) pour la création de nouveaux médias en Russie ainsi que le lancement de la diffusion numérique pour l’Asie Centrale et les autres régions où la Russie soutient des conflits gelés (telles que la Transnistrie, l’Ossétie de Sud, l’Abkhazie et le Caucase de Nord).
J’ai cité les chiffres que vous compreniez qui et dans quel but finance le Congrès US à travers cette agence.
A partir de cette année l’agence n’existe plus. Mais il serait prématuré de se réjouir et de déboucher le champagne. Bien que l’édito de The Washington Post «Des changements importants en marche dans la diffusion audio-visuelle des USA et ils peuvent plaire à Poutine» exprime un point de vue bien différent. «Prochainement, ce système va vivre des changements radicaux qui vont probablement plaire beaucoup à Vladimir Poutine et à l’émir de Katar (fondateur de la chaîne Al Jazeera)»… «L’administration Obama, qui misait certainement sur l’élection d’Hillary Clinton, a soutenu ces changements. Maintenant, il ne reste aux fonctionnaires du président sortant dans le domaine de la diplomatie publique qu’espérer que Trump porte son choix sur un manger fidèle aux traditions des médias américains indépendants et de qualité, plutôt que sur un politicien loyal ou un idéologue ultra-conservatif. Dans tous les cas, nous aurons vraisemblablement affaire à un exode massif des professionnels expérimentés des médias alternatifs, ce qui signifie que la qualité de la diffusion audio-visuelle américaine à l’international baissera quels que soient ses défauts actuels.»…
En fait, désormais, au lieu d’une agence composée de 9 personnes, la politique informationnelle extérieure américaine sera dirigée par une seule personne, nommée par le nouveau président Donald Trump. Personnellement, je n’y vois pas de raison pour être optimiste, car Trump est un magnat des médias qui, mieux que quiconque, comprend l’importance et l’efficacité de l’influence exercée par les médias sur les esprits des gens. Lui, qui a remporté sa victoire aux élections présidentielles grâce à Twitter et Facebook, doit comprendre très bien comment il convient d’agir et qui nommer à ce poste d’une très grande importance. Certes, pendant un certain temps toute la structure sera chamboulée à cause de ces changements profonds, mais ce processus ne sera pas si long que ça quand on a des cadres expérimentés. A la sortie, nous aurons un système de propagande bien rodé.
De belles paroles que ce qui rend les médias contrôlés par l’agence «particulièrement attrayants pour le public consistent non pas dans leur capacité de représenter la ligne du gouvernement, mais dans leur indépendance journalistique»… «La tâche de l’agence de surveillance était de niveler l’éventuelle influence sur l’activité de ces services de la Maison Blanche, du Département d’Etat et des autres organismes. Il servait de garantie qui depuis plusieurs années aidait à attirer dans ces médias des journalistes talentueux, ainsi que le public qui cherchait à obtenir des informations fiables» peuvent avoir de l’effet uniquement sur des personnes qui sont à deux mille lieus de la géopolitique et du fonctionnement des médias. Je pense qu’on n’arrivera pas à trouver dans l’histoire un cas de figure où le gouvernement (peu importe le pays) consacre des moyens financiers aussi importants sans un but politique précis.
En guise de conclusion : sur le site de l’Agence une photo fait la fière dans la rubrique «Mission», la photo faite quelque jours après que le président Ianoukovitch avait fui le pays.:
Nous savons tous, quelles conséquences ont provoqué les événements du Maïdan et combien de personnes ont péri après… Mais eux (l’Agence) pensent avoir fait quelque chose dont ils peuvent se sentir fiers. Je pense que ce n’est pas le bon média qui a été mis au même rang que l’EI.
Gueorgui Morozov, rédacteur en chef de Novorossia Today
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