Prologue.
– D’où êtes-vous, si je peux vous poser cette question ?
– De la Pologne.
– Tu vois, jusqu’où cette guerre est déjà allée ! Personne ne peut plus rester à l’écart. Qui l’aurait cru, il y a seulement 5 ans, que le frère va tuer l tuera son frère, le père tuera son fils. Tout ça au nom de quoi ? Au nom des oligarques, parce que les gens naïfs sur la place de Maïdan sautaient. Tous ces Tourtchinov, Iatseniouk, Porochenko criaient pour nous faire partir d’ici. Pour aller où ? Et surtout pourquoi ? J’ai ici mon appartement que j’ai acheté, ici j’ai grandi et mes enfants sont nés ici, j’ai travaillé, je travaille et je veux travailler. Pourquoi devrais-je partir ? Ce n’est pas avec mon taxi qui est allé à Kiev, c’est Kiev qui a envoyé ses chars sur nous. Nous : moi, mes enfants, mes voisins et ils nous disent de partir. Eh bien, ils peuvent toujours attendre jusqu’à la Saint-Glinglin.
***
Le bourg Zaitsevo est le point du territoire de l’oblast de Donetsk le plus avancé vers le Nord. Et, au même titre que l’aéroport de Donetsk, il représente une porte d’entrée dans la capitale de la DNR : le bourg de Zaitsevo se trouve sur le chemin à l’entrée à Gorlovka, et si Gorlovka qui est q l’une des plus grandes villes de DNR tombait, Donetsk serait encerclé de presque toutes les côtés.
Dans ce village cantonne la 3e brigade d’infanterie motorisée de la Garde. Elle défend ce tronçon du front qui pénètre par endroits dans ce village jadis paisible. Les positions ukrainiennes sont à peine à quelques dizaines de mètres de l’école, les gens du village continuent à vivre en première ligne ou le places et les rues entières se sont transformées en ruines ou champs de mines.
Dans l’un de ces lieux, les soldats racontent :
– Ils pilonnent un endroit avec des blindés, ensuite des soldats viennent installer des pièges avec des grenades. Pendant ce temps-là, les gens continuent à y faire des courses, rendre des visites à leurs les voisins… comme résultat des civils se font tuer. Hier par exemple, une personne a été tuée et une autre grièvement blessé.
Un soldat à l’indicatif « Jeleznyï » (NDT : un homme de fer) complète l’histoire :
– Nous ne sommes même pas en mesure d’aider ces gens : si on se met en groupe, oms tirent sur nous. Comme hier, nous avons dû convoquer l’OSCE pour qu’ils viennent emmener le blesser et enlever le cadavre. Les Ukrainiens racontent que nous avons évacué nos soldats de la DNR pour les faire soigner chez nous.
Les gens racontent que les balles frappent les maisons, sans un but précis : d’abord une maison, et peu de temps après une autre, quelques dizaines de mètres plus loin. On trouve partout des éclats d’obus qui n’ont pas explosé, des projectiles des BMP.
Une épicerie qui se trouve 300 mètres plus loi et tenue par Tamara. Pendant la 2e guerre mondiale sa mère avait perdu toute sa famille en une journée et 70 ans plus tard, la même chose lui est arrivée, à elle, avec la sienne. J’ai fini par déduire que pendant des pilonnages, les endroits le plus sûrs sont ceux où il y a des militaires. Quelle ironie de sort, n’est-ce pas ? Pendant cette guerre, ont vise rarement des cibles militaires, mais les principaux cibles sont des zones où se vivent des populations civiles, des arrêts de bus, des écoles.
Les pilonnages de Zaitsevo se sont particulièrement intensifiés au cours des dernières semaines. Plus les accords de Minsk peinent à se mettre en œuvre et plus la menace de la guerre devient grande. En attendant, les habitants, avec l’aide de l’armée républicaine, réparent les dégâts subis par leurs habitations et s’obstinent à vouloir rester dans leurs dans leurs maisons, mais que va-t-il arriver ensuite ? Quand les bombardements – jusqu’à présent sporadique et réalisés principalement avec les armes des BMP et des fusils de snipers – deviennent comme ce qu’on a connu l’année dernière, om les pilonnages se faisaient avec l’artillerie lourde et les lance-roquettes multiples ? Lorsque seuls les murs restaient des maisons entièrement brulées.
Ou encore d’une autre manière, il n’y pas longtemps le SBU s’est vantée d’avoir interpellé à Avdeïevka des personnes sympathisants aux séparatistes. Si Zaitsevo venait à se faire reprendre par les Ukrainiens via cette soi-disant « Opération Antiterroriste » ? Que deviendront ces habitants qui chaque fois saluent les soldats avec un sourire, et bien que très pauvres eux-mêmes, partagent avec eux ce qu’ils peuvent. Pourquoi ? Nous demandons à l’un des volontaires, d’où il vient :
– De là-bas, répond-il avec un sourire, en montrant la direction avec sa la main.
Une agression ? Une invasion ? C’est tellement facile de raconter n’importe quoi en imaginant des choses, mais venez parler aux gens qui vivent sur le front, écoutez ce qu’ils disent. Et ensuite pensez à ceux qui avaient renversé le pouvoir légitime à Kiev (de façon « très démocratique »), et ensuite avaient lancé « une Opération Antiterroriste » contre ceux qui s’y sont opposés. Et pensez aussi à la façon dont vivent ces gens pour qui l’unique espoir de rester en vie et de résister.
Reportage et photos : Dawid Houdziec
Traduit depuis le polonais par Svetlana Kissileva
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