Lorque j’ai vu, il y a quelques jours, la couverture de Libé avec de jeunes enfants, semblables à des poupées de cire sur fond noir, yeux morts rivés sur un ciel invisible, je me suis dit que les spécialistes des guerres de l’image commençaient à manquer cruellement d’imagination et qu’ils nous refaisaient, cette fois pour diaboliser davantage encore l’infernal Assad, le coup d’Aylan qui, lui, devait servir à dénoncer l’Europe anti-immigrationiste. Je me suis dit également que la surexploitation des ce genre d’images, la surenchère de l’apitoiement, trahissait des médias en peine, voire à court d’arguments. Je ne me suis pas trompée. La Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) a subitement décidé de satisfaire la requête de 409 victimes de la prise d’otage de Beslan, du 1 au 3 septembre 2004, pour rappel, en condamnant Moscou à verser 3 million d’euros de compensation. Le grief avancé est plutôt surprenant : en 2004, alors que la Tchétchénie sort progressivement d’un chaos long de 10 ans et que le spectre d’un Califat islamique pancaucasien ne s’est pas encore retiré, les services de renseignement russes n’auraient pas été suffisamment prudents pour prévenir un attentat aussi énorme par son ampleur et son bilan puisque, sur plus de mille personnes prises en otage, 376 ont été tuées, dont 186 enfants. Au-delà de ces chiffres hallucinants, des émotions, et des circonstances formelles de cette tragédie, quels faits cruciaux sont à retenir parce qu’ils invalident totalement la décison de la Cour ?
Contexte politique :
La prise d’otage s’est faite trois jours après les élections présidentielles en Tchétchénie. Celles-ci ont confirmé le choix pro-russe (lire, notamment, laïc) de la population locale, et ont été reconnues transparentes par la communauté internationale malgré les crispations attendues du monde anglo-saxon qui espérait le triomphe du Califat. Le climat politique général était donc en voie de redressement ce qui avait été d’ailleurs confirmé par le couple franco-allemand lors du sommet de Sotchi.
L’enfer de Beslan s’étant étalé sur trois jours, Moscou n’avait pas tardé à saisir le Conseil de sécurité de l’ONU en s’attendant à une résolution immédiate et musclée. Or, le Conseil s’était borné à une simple condamnation. L’appel de Moscou était d’ailleurs symptomatique puisqu’il sous-entendait qu’une (ou des) puissance (s) étrangère(s) aurait (ent) été impliquée(s) lors des faits.
L’attentat a été aussitôt revendiqué par Chamil Bassaïev, indépendantiste islamiste, un des théoriciens du Califat islamiste pancaucasien. Les terroristes qui ont pris d’assaut l’école n’étaient que des mercenaires carburant aux drogues dures et qui agissaient sous l’effet du syndrome de sevrage. Ces faits connus, reconnus, et devenus de notoriété publique, la chaîne américaine ABC n’a pas hésité à interviewer ce personnage que 20minutes, au lendemain de sa mort, qualifiera de « chef de guerre impitoyable » l’article en soi comportant des notes d’admiration flagrante, sinon de singulière sympathie. Qui plus est, deux ans après Beslan, son instigateur, l’ « émir de Tchétchénie et du Daghestan », se retrouvera promu vice-premier ministre du gouvernement indépendantiste tchétchène en exil … à Londres, et à Washington. Marie Jego, correspondante du Monde à Moscou, se demandera alors, en toute bonne foi, si la nomination de cet « émir » n’augurait pas la radicalisation de la guérilla. Beslan sera quant à lui qualifié d’ « humiliation pour Moscou ».
Contexte moral et technique :
La libération des otages a duré trois jours. Aucune revendication n’avait été formulée par les preneurs d’otage planqués dans l’établissement, il fallait compter 20 personnes exécutées – enfants, professeurs, parents d’élèves tous confondus – pour chaque vermine islamiste blessée, des guirlandes d’explosifs ne tenant qu’à de simples sparadraps tapissaient le plafond du gymnase et des salles de classe, les terroristes, comme je l’ai indiqué plus haut, étaient incontrôlables car il ne s’agissait que de toxicomanes en état de manque aigu. Dans ces conditions extrêmes, presque surréalistes, on constate que les forces de l’ordre ont fait, autant que possible, … l’impossible. Quant aux enfants, je n’oublierai jamais cette phrase lancée par un garçonnet de primaire : « Moi, j’ai tenu jusqu’au bout, j’avais soif, mais je n’ai pas bu mon urine ». Lorsque la police s’est montrée incapable d’arrêter le camion-bélier de Nice que deux civils ont héroïquement fini par arrêter, Moscou n’a pas parlé d’ « humiliation » pour Paris, et n’a pas passé au crible d’une analyse pour le peu cynique les agissements (inexistants) de la police qui d’ailleurs, si l’on enfonce le clou, était presque absente des lieux malgré le contexte mouvementé dans lequel s’inscrivait le 14 juillet dernier. Et si l’on se revenait sur les mille et quelques agressions sexuelles du réveillon 2015, à Cologne, agressions récidivantes et, en effet, humiliantes pour les autorités allemandes, d’une part, pour les Allemands de sexe masculin, de l’autre ? Là, par contre, la CEDH se montre autrement plus discrète. N’aurait-elle pas été dérangée par d’éventuels requérants ?
Permettez-moi un autre parallèle, on ne peut plus factuel. Le Comité Révolutionnaire International pour la renaissance du kadhafisme en Libye, par la voix de son représentant franças, Franck Pucciarelli, a plus d’une fois prévenu les autorités des attentats qui se préparaient en France, Bataclan et Promenade des Anglais y compris. Il sonne le tocsin depuis 2011 sans jamais qu’il y ait réaction adéquate de la part du renseignement et des services de sécurité.
Pourtant, le contexte actuel français (ou allemand, ou suédois) est loin d’être celui de la Tchétchénie au lendemain de deux guerres.
Moralement, on comprend que les victimes de Beslan et leurs proches aient voulu saisir la Cour. C’est leur droit naturel, le droit légitime de toute personne qui a vécu l’enfer ici-bas et qui, croyant de fait à une maigre consolation, cherche à punir les responsables de ses maux. Pour mémoire, certains parents étaient même allés jusqu’à solliciter un certain Grobovoï, charlatan qui promettaient de ressusciter les petites victimes. Leurs mères y croyaient, elles qui passaient jour et nuit au cimetière, espérant … sans savoir quoi, au juste.
Le verdict (soudain ?) de la CEDH n’est pas seulement orienté. La façon dont la condamnation est motivée pousse à croire que le Kremlin avait alors laissé faire la racaille islamiste à des fins de récupération politique, accusation initialement formulée au moment du déroulement de la tragédie, et réitérée ces derniers jours, en parallèle avec la thèse de l’implication supposée de la Russie dans la supposée attaque chimique d’Idlib lancée, tout aussi supposément, par « le régime » de Damas. Alors qu’il s’agisse des « enfants d’Assad » ou des enfants de Beslan que Libé a oublié de présenter comme les « enfants de Poutine », qu’il s’agisse des enfants irakiens ou des enfants serbes qui, grâce aux bombinettes à l’uranium appauvri de l’OTAN, savent mieux que quiconque ce qu’est le cancer néonatal et les malformations, la CEDH saura exhumer, l’instant propice, les bons cadavres. Pourquoi pas, après tout, si ces cadavres – mieux vaut que ce soient ceux d’enfants ! – confortent l’hypothèse d’attaques inexistantes, ou insinuent que le Président de tel pays non-aligné est coupable de complicité pragmatique avec des islamistes tueurs et violeurs d’enfants.
Françoise Compoint
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