Dans un entretien réalisé pendant un entraînement miliaire à Donetsk, Sergueï Zavdoveïev, aussi appelé « le Français » (commandant de la Légion de Donetsk fondée en mai 2015 et ancien de la Légion étrangère ), Sergueï Terikov (responsable du recrutement des Légionnaires de la république populaire de Donetsk) et Sémion (adjoint du commandant de la Légion ), parlent de leur parcours militaire, de la création de cette unité d’élite, la Légion de Donetsk, de la formation militaire et des combats dans le Donbass.
N.T : Sergueï Terikov, des critères de sélection donc difficiles ?
Sergueï Terikov : Oui, vous savez je suis le responsable du recrutement de l’unité spéciale de la Légion qui dépend du ministère des situations d’urgence de la République Populaire de Donetsk. Nous recevons beaucoup de demandes pour intégrer notre unité d’élite. Mais les critères sont très sélectifs. La nouvelle recrue rencontre d’abord un psychologue avec lequel il passe des tests d’aptitude. Parmi nos recrues nous comptons un grand nombre de soldats qui ont déjà combattu. Ces derniers veulent défendre leur Patrie et ils viennent s’inscrire chez nous. La nouvelle recrue doit réunir de nombreux documents et obtenir l’autorisation des services de sécurité. Ensuite la nouvelle recrue vient dans mon bureau et nous parlons. Cela me permet de prendre une décision. Notre unité de la Légion donne au moment de l’affectation une solde au soldat, le nourrie, l’habille et l’équipe de la tête aux pieds. Une fois son package embarqué, nous passons à la sélection sur le terrain. Les recrues suivent une formation d’un mois avec nos instructeurs. Et ce temps de formation est décisif. Si la recrue ne passe pas avec succès les épreuves de terrain à l’issue de ce mois d’essai, elle doit nous quitter. Il est, en effet, très dur d’intégrer notre unité. Parmi nos éléments et recrues nous avons des militaires qui étaient déjà des professionnels et qui connaissent le combat et la guerre. Nos recrues vivent avec les plus anciens dans des casernes car la guerre n’est toujours pas finie. Nous connaissons seulement un cessez-le-feu. Cependant nos soldats obtiennent une permission de pouvoir voir leur famille 1 fois par semaine.
NT : Sémion, nous sommes sur le site de l’entraînement. Quelles sont les modalités ?
Sémion : Je suis adjoint de Sergueï Zavdoveïev, commandant de la Légion de Donetsk, et responsable de la préparation de nos soldats et de leur aptitude au combat. Nous assistons à un entraînement pour vérifier la coordination de nos actions dans le cas d’une offensive et durant un repli. Nous avons un exercice qui concerne la mise en place de l’infanterie sur le terrain par l’emploi des blindés comme moyen de transport. Des exercices de tirs ont lieu tout comme dans un vrai combat. Il serait idéal de s’entraîner tous les jours mais nous le faisons actuellement 1 à 3 fois par semaine pour maintenir un bon niveau d’entraînement des soldats car c’est leur vie qui en dépend. L’aptitude au tir, des gestes pour la sécurité durant la manipulation des armes, sont les leçons essentielles. C’est la base et cela permet de voir la qualité militaire des soldats. Nous voyons des BMP 1 et BMP2 avec les BTR et 60 soldats (qui ne sont pas actuellement en mission) qui participent à la manœuvre aujourd’hui. Cela représente une compagnie. La sécurité est l’élément principal de notre entraînement et des observateurs sont là, par exemple, pour empêcher des civils ou des animaux de rentrer sur des zones de tir. Un tir peut tomber avant ou après la cible. Les habitants qui vivent autour du terrain d’entraînement sont maintenant habitués aux tirs et aux explosions. Ils ont pris l’habitude des tirs et ne vont plus se cacher en se mettant à l’abri ce qui est une mauvaise habitude. Plusieurs unités s’entraînent ici.
NT : Sémion, vous êtes aussi un ancien de la Légion étrangère !
Sémion : Oui, je suis parti à la Légion étrangère après avoir servi dans l’unité d’élite ukrainienne Berkout. A la Légion étrangère j’ai eu ma dose d’aventures pendant 1 an de 2012 et 2013. Dès que la guerre a commencé chez nous, je suis revenu pour défendre ma Patrie et ma terre. J’ai obtenu à la Légion étrangère de l’expérience. Je suis fier de savoir qu’en Europe des gens nous supportent mais notre peuple dénonce le soutien de l’Europe envers le gouvernement ukrainien de Kiev car il est question d’une affaire interne. Ces européens reçoivent les ordres des Etats-Unis. C’est de la politique. Mais je pense que nos frères slaves ne nous laisserons pas tomber. Je tiens à remercier tous ceux qui nous soutiennent. Je souhaite aussi saluer tous mes amis qui servent toujours au 2e REP en Corse.
NT : Sergueï Zavdoveïev votre analyse sur cet entraînement !
Sergueï Zavdoveïev : Vous venez d’assister à des manœuvres tactiques. Vous avez pu voir travailler les blindés. Le BMP Kopeïka, qui est armé avec du 70 millimètres est un vrai petit char, le BMP 2, le BTR employé pour la reconnaissance, participent à ces manœuvres qui ont lieu tous les jours avec des spécialistes ou des jeunes recrues. Nous vérifions les coordinations des actions, la manipulation des armes, l’emploi des blindés et la communication surtout dans les situations de combat quand il n’y a pas de communication. Nos soldats apprennent à gérer des situations d’embuscade, à accomplir la mission et protéger les soldats. Mon responsable, devenu aujourd’hui le chef de notre Etat, m’a donné mon nom de code “le Français”.
NT : Sergueï Zavdoveïev, c’est étonnant comme code « le Français » ! Cela vient du temps de la Légion étrangère ?
Sergueï Zavdoveïev : La Légion de Donetsk a été fondée à la base par le bataillon Oplot de ceux qui ont intégré le bataillon en mai, juin et qui ont participé à tous les combats. Je voulais depuis longtemps fonder notre unité et réunir autour de nous les personnes qui sont particulièrement motivées pour s’améliorer au combat. En avril et mai 2015 nous avons fondé la Légion qui a été promulguée par un décret. Mais déjà en juillet 2014, durant les combats, nous avons eu l’idée de fonder la Légion. C’est venu quand nous avons participé aux batailles de Chakhtersk, de Lougansk, de Nijnaya Krynka et de Stepanokrynka. Nous avons arrêté l’offensive ukrainienne près du bourg de Nijnaya Krynka. Mon unité faisait des tirs à une distance de 1 à 2 km des troupes ukrainiennes. Dès mon arrivée à Donetsk j’ai eu cette idée de fonder la Légion car j’ai aussi servi à la Légion étrangère. J’ai présenté mon idée à plusieurs reprises au président Zakhartchenko qui adonné son accord. La nouvelle recrue passe plusieurs tests, des entretiens. Durant l’entraînement nous voyons si la recrue a les qualités morales et les aptitudes. Les recrues peuvent devenir des snipers, des mitrailleurs, des chauffeurs, des mécaniciens pour les blindés. Pendant 1 mois on voit si la personne fait l’affaire. Des visites médicales ont lieu. Puis la recrue doit prêter leur serment est intégrer l’unité.
NT : Sergueï Zavdoveïev, vous l’ancien légionnaire, la France vous considère comme un terroriste ?
Sergueï Zavdoveïev : La France n’agit pas très bien car elle a bloqué ma retraite, ma pension de soldats de la Légion étrangère. Mon appartement qui m’a été offert par la Légion à Paris m’a été retiré et je suis recherché par Interpol. Si j’arrive à Paris, je me fais immédiatement arrêter. Je suis considéré par l’Etat français comme un terroriste. Je trouve que c’est triste. Si un jour je reçois l’ordre de prendre la France, je vais la prendre et leur rappeler ce qu’ils m’ont fait. Je plaisante bien sûr… Je suis rentré dans la Légion car j’ai toujours été attiré par l’entraînement physique. En fait je suis né avec un pistolet dans la main. Je me suis intéressé à des personnages historiques, comme Napoléon, Alexandre le Grand, ou Alexandre Nevski. La Légion étrangère a toujours été considérée comme la meilleure en ce qui concerne l’entraînement physique et l’aptitude au combat. Ce sont les plus professionnels. C’est aussi une légende cultivée par des films. Je me suis engagé à l’âge de 17 ans et je voulais y trouver ma dose de romantisme. Je suis revenu avec 3 balles au ventre et handicapé.
NT : Sergueï Zavdoveïev votre expérience du terrain et de la guerre ici avec le chaudron de Debaltsevo !
Sergueï Zavdoveïev : L’honneur est pour nous important ici. J’ai toujours été à côté de mes hommes. Je ne me suis jamais réfugié dans l’état major. Mes hommes représentent ce qu’il y a de plus cher à mes yeux. Nous avons partagé notre gamelle, porté ensemble les blessés. Nous avons combattu ensemble, dormi ensemble. A Logvino j’ai reçu l’ordre de prendre le bourg le matin pour fermer le chaudron. Je suis arrivé à Ouglégorsk. Durant 9 jours les Ukrainiens ont essayé de prendre le bourg. Nous étions 70 à pied et nous avons réalisé que nous allions dans un chaudron. Nous étions entre Artëmovsk et Debaltsevo. Nous avons pris de 2 positions en hauteur et nous nous sommes trouvés dans une poche, entourés des Ukrainiens. Nous avons chassé les Ukrainiens mais les Ukrainiens se sont abattus sur nous et nous ont bombardés durant 2 jours. Les renforts n’arrivaient pas à passer. Mais nous avons tenu.
NT : Sergueï Zavdoveïev qu’est-ce-qui était le plus important pour vous durant la bataille de Debaltsevo ?
Sergueï Zavdoveïev : Le plus important pour moi n’est pas simplement d’avoir accompli les ordres mais de n’avoir pas eu un seul blessé.
NT : Sergueï Zavdoveïev, comment avez-vous été blessé en Afghanistan ?
Sergueï Zavdoveïev : Nous n’avons pas eu l’occasion de participer à des combats directs du temps de mon affectation à la Légion. Mais, une fois, nous sommes partis en mission en Afghanistan. Je pense que c’était un piège tendu par les Américains car les Afghans n’utilisaient pas le calibre d’armes des soldats américains. Des Américains ont dû nous tirer dessus. Les balles, qui ont été retirés de mon ventre, étaient du calibre 5,6, le calibre des armes américaines et qui n’étaient pas utilisées par les rebelles afghans.
NT : Sergueï Zavdoveïev, il vous reste quoi de la Légion ?
Sergueï Zavdoveïev : Après avoir la Suivi la formation au combat j’ai été blessé. On m’a octroyé la retraite de 3200 euros mais je n’y ai plus accès. J’ai reçu une croix de fer. Nous étions des jeunes bleus et nous nous sommes fait tirés dessus. Les préparations physique, tactique et morale sont très bonnes. Je suis considéré comme terroriste. La France a pris mon appartement. Mais je me bats pour ma Patrie et c’est le Donbass, la République Populaire de Donetsk. Ils n’ont qu’à se les mettre où je pense. Envers les Français j’ai une attitude négative.
NT : Sergueï Zavdoveïev, vous êtes dégoûté par l’attitude de la France ?
Sergueï Zavdoveïev : Pourquoi la France envoie ses instructeurs en Ukraine ? Car les Ukrainiens sont formés par l’OTAN et par des instructeurs de la Légion étrangère française ! Je les connais et je n’arrive pas à le comprendre car ils doivent bien voir comment on tire au gros calibre sur les villes, avec du phosphore blanc. J’ai vu tout ça dans le chaudron de Debaltsevo. C’est pour moi de la barbarie à l’état pur. Les Ukros ont peur du combat direct avec nous car ils prennent la fuite mais pour brûler une ville avec des chars ils n’ont pas de problème.
NT : Sergueï Zavdoveïev, l’OSCE ?
Sergueï Zavdoveïev : Les organismes internationaux ne vont pas de l’autre côté et viennent sur le terrain quand tout est fini. Je pense qu’ils ne présentent pas des faits tout à fait objectifs et qu’ils sont du côté des Américains.
NT : Sergueï Zavdoveïev, votre avis sur les volontaires français qui se battent sur le terrain ?
Sergueï Zavdoveïev : Sur ces Français qui combattent dans le Donbass, je ne peux rien dire à leur sujet car je ne les connais pas. Je les ai seulement vus sur des vidéos. Sur ces vidéos j’ai vu qu’ils faisaient parti d’autres unités. J’ai eu un Français dans mon unité et qui est mort. C’était un Chakhtersk.
NT : Sergueï Zavdoveïev, vous aimeriez voir des Français servir chez vous ?
Sergueï Zavdoveïev : En fait si les étrangers viennent ici pour aider, ils sont les bienvenus. Je les remercie chaleureusement. Mais il faut que leur but soit pour aider et non pas pour participer à un Safari. Nous sommes prêts à accueillir chez nous les gens de toutes les nationalités quelle que soit leur origine. Mais ils doivent passer tous les tests physiques et psychologiques pour prouver leur aptitude au combat puis ils ont un mois d’essai. Ils doivent montrer leur capacité à intégrer l’unité, être capable de combattre en équipe et on peut voir ainsi pourquoi ils viennent ici. Viennent-ils pour de l’argent ? Pour tuer ? Tirer ? Toutes sortes de personnes peuvent venir ici. Ceux qui veulent tuer ne sont pas les bienvenus. Car si nous tuons c’est que nous sommes obligés. Je ne laisserais pas l’ennemi rentrer sur ma terre et je remercie tous ceux qui nous supportent car nous sommes convaincus que nous allons gagner cette guerre. Je suis persuadé que nous allons être reconnus tôt ou tard et c’est à ce moment que nous allons pouvoir parler à ceux qui ne nous ont pas soutenus.
NT : Sergueï Zavdoveïev, vous avez de nombreuses médailles !
Sergueï Zavdoveïev : J’ai obtenu l’ordre du mérite au combat, celle en argent, en or et en bronze, des médailles obtenues pour les batailles d’Ilovaïsk, de Troitsko-Khartsyzk et d’Olkhovka. J’ai 2 croix de Saint George du 3ème et 4ème degré. Le 4ème niveau je l’ai obtenu pour avoir éliminé l’escadron noir de Dimitri Iaroch, le commandant de Pravi Sektor. C’était près du bourg de Chaktersk. Là, nous avons éliminé 300 personnes du bataillon Noir de Iaroch qui a été aussi blessé et évacué via Kirovskoïe. Le 3ème degré c’était pour Starobechevo quand nous avons pris le bataillon Krivbass et fait prisonniers 200 soldats, capturé 5 chars et 8 BMP. J’ai offert à la 5e brigade les chars et libéré les prisonniers (selon les ordres du commandant suprême, président Zakhartchenko). Mais nous avons gardé les officiers. Les jeunes soldats qui ont déposé les armes n’avaient pas compris avec qui ils étaient venus se battre. Quand nous les avons faits prisonniers ils croyaient qu’ici il y a des mercenaires étrangers, des terroristes. Ils n’ont vu que les hommes d’ici et n’ont pas compris pourquoi ils sont venus se battre ici. Les médias mainstream étrangers parlent toujours de la présence russe. J’ai expliqué aux prisonniers que ce n’est pas vrai. Je leur ai, par exemple, dit que mon nom est Zavdoveïev et qu’ils pouvaient le trouver sur internet et ce qui montre que je viens d’ici, plus exactement, de la ville de Makeïevka près de Donetsk. Tous mes combattants sont des gars d’ici. Il y a quelques Russes. Ils n’ont pas voulu restés à l’écart. Ils sont venus pour nous aider mais ce ne sont pas des militaires de carrière, mais des hommes qui ne pouvaient pas rester sans rien faire ne risquant leur vie pour nous aider.
Reportage et interview de Svetlana Kissileva et Olivier Renaut
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