J’ai toujours su que l’humour anglo-saxon avait quelque chose de piquant. De tellement piquant, de tellement subtil, que l’entendement français (comme tout autre entendement, d’ailleurs) peinait à en saisir le génie. L’humour américain est encore plus inqualifiable. Je le croyais rudimentaire, souvent déplacé, or, en lisant les médias US sans traduction, je m’aperçois qu’il est, en plus, surréaliste. La récente publication sur tweeter de Neil MacFarquahar, journaliste américain travaillant à Moscou pour le New York Times, doublée de celle de Neil Buckley du Financial Times (post retiré par la suite), révèle au public occidental que le Kremlin aurait fait installer des hérissons tchèques et des barricades le long de la principale rue radiale de Moscou, rue Tverskaya, à des fins … dissuasives.
En effet, il est bien connu que l’opposition russe a l’habitude de louer des chars pour manifester. Certains de ses représentants vont même jusqu’à traîner les vieux tanks de pépé jusqu’à Moscou histoire d’intimider l’autocrate Poutine et ses vassaux. Le 12 juin, date à laquelle l’assaut devait manifestement être lancé, la Russie fêtait la Journée de la Russie (ancienne Journée de l’indépendance [de l’URSS]). La rue Tverskaya étant comparable aux Champs-Elysées, des foules en liesse, drapeau national à la main, sont venues fêter, se détendre, et profiter d’une belle journée ensoleillée en famille. Comme le patriotisme russe est à peu près ce qu’était le patriotisme français il y a 100 ans, les autorités de la ville ont décidé d’organiser une reconstruction historique en mémoire des défenseurs de la capitale en 41-42. Les pièges anti-char et les sacs de sable entassés ramenaient aux heures angoissantes de l’opération Typhon à laquelle d’immenses hérissons érigés en 1966 à côté de l’autoroute M10, à l’entrée de Moscou, font allusion. Je me demande si les sieurs MacFarquahar et Buckley les ont vus. Si oui, n’ont-ils pas supposé qu’il s’agissait d’une tactique de dissuasion des opposants résidant dans l’oblast’ ? Ou que Poutine s’était inspiré des méthodes de ses prédecesseurs du KGB pour prévenir toute atteinte à son hégémonie ?
Neil Buckley sent bien que son commentaire manque de sérieux. Alors il en rajoute une couche, estimant, sur le coup, faire très sérieux : Officiellement, les autorités parlent d’une reconstruction, mais en réalité … (moi, Neil Buckley, je suis dans le secret de Dieu … ou du moins, de Poutine. Je sais ce qu’il pense même s’il ne l’a pas encore pensé ou s’il ne le pensera jamais).
Vous savez, il y en a marre. Je me demande comment Poutine arrive à tenir face à tant de misère intellectuelle et de mauvaise foi. Entre le référendum criméen qui s’est fait au son des kalachnikov, l’armée russe qui inonde le Donbass avec ses milices républicaines qui se pilonnent toutes seules, les attaques chimiques en Syrie couvertes par les bombardiers russes, les hackers russes aux ordres qui pirateraient l’AMA, les élections américaines et françaises, le Kremlin qui couvre les atrocités tchétchènes contre les LGBT qui ont aussi la vie dure en Russie, les opposants systématiquement emprisonnés, voire liquidés depuis la plus haute tour du Kremlin comme Nemtsov … De toute évidence, le evil empire de Reagan est capable de tout et semble s’en targer au lieu de présenter au monde un ultime mea culpa et se laisser dépecer selon la recette des gentils libéraux russes nostalgiques de l’ère des Lumières eltsinienne.
Sauf qu’aux dernières nouvelles, les plateaux débats sur les chaînes publiques russes regorgent de Lumières dites libérales ( les ukrainiens Vadim Kerasov, Olesia Jakhno, Viatcheslav Koftoun, et l’américain Michael Bom pour citer les principaux, omniprésents !), la police russe n’emploie pas de gaz lacrimogène et de matraques contre les manifestants, une certaine partie de mes élèves de FLE n’hésitent pas à dire qu’ils votent contre Poutine et l’écrire, avec des mots parfois très durs, sur vkontakte (facebook russe), facebook, tweeters et autres réseaus sociaux où l’on trouve tout, n’importe quoi, et son contraire, contre un « régime » qui arrive à tolérer une radio soutenant les nazillons ukrainiens aux frais du contribuable (Echo de Moscou, sponsorisé par Gazprom, donc par le contribuable) ou une chaîne comme Dojd’ (privée, au financement opaque) qui avait demandé à son public, dans le cadre d’un sondage, s’il n’eût pas été préférable de livrer Léningrad aux Allemands pour sauver des centaines de milliers de vies ? (SIC).
Si vous demandez qui est Navalny, je vous répondrai en deux phrases. C’est le type qui a promis, s’il est élu, de faire sortir les troupes russes du Donbass pour enfin permettre aux habitants de la RPDL de goûter aux fruits suaves de l’européisme made in USA, de voyager dans les pays de l’UE sans visa, et de bosser à 3 centimes l’heure sur les chantiers allemands. C’est le type qui a fait sortir de très jeunes ados dans les rues, galvanisant des esprits naturellement immatures.
Sauf que … Navalny propose de retirer des troupes inexistantes. C’est donc un magicien. Et cela explique qu’il aille affronter Poutine en char, traversant triomphalement l’artère principale de la ville. Si ce n’était les hérissons tchèques du gremlin du Kremlin, il y serait déjà. Dans le fauteuil présidentiel. Alors à quand des chars volants ?
Françoise Compoint
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