Dimanche soir, l’une des plus grandes chaînes de télévision ukrainienne, Inter, qui semble ne pas tenir des propos alignés sur ceux du pouvoir a subi une attaque extrêmement bien planifiée, médiatiquement et techniquement. Locaux incendiés, blessés hospitalisés et pas un média occidental pour s’inquiéter de l’atteinte portée à la liberté d’expression.
Dans la nuit du 4 au 5 septembre, après que la presse ait insisté sur la présence d’une manifestation pacifique avec petites tentes devant la chaîne de télévision ukrainienne Inter, des groupes armés entrent dans le bâtiment alors que des journalistes y travaillent et y mettent le feu.
Source : Radio Svoboda
Tout cela a commencé après la “révélation” par la presse ukrainienne de soi-disant échanges de correspondance entre l’ancienne rédactrice en chef d’Inter avec le policymaker Igor Chuvalov, qui aurait un passeport russe.
La presse française ne veut pas voir de quoi il s’agit et minimise à l’absurde les faits, tout en refusant toute analyse et en reprenant à mots couverts la version lancée par le pouvoir: une manifestation pacifique a eut lieu, les services de sécurité sont intervenus ce qui a provoqué les échauffourés et l’incendie. Sans oublier qu’il n’y aurait pas de victimes.
Pour informations, cinq personnes ont été hospitalisées suite à l’incendie volontaire, leur état est stable et moyennement grave. Mais cela n’a pas dû paraître important pour les journalistes français.
Autre information truquée par la presse française. La police serait intervenue et aurait arrêté des responsables. Or, les 6 personnes réellement interpellées sur les lieux furent immédiatement libérés, sans n’avoir finalement été accusés de rien. Le ministre de l’intérieur Avakov affirme que ce sont des anciens militaires de la 30e brigade. Et maintenant que tout le monde est bien en liberté, chacun crie plus fort que l’autre qu’il faut arrêter les responsables.
Pour autant, la version avancée ne correspond pas du tout à la description des faits que les journalistes de Inter ont mis en ligne:
Les journalistes d’Inter expliquent que cette action a été très bien préparée. La presse s’est d’abord empressée de souligner le caractère pacifique de la manifestation. Ensuite, les manifestants pacifiques ont apporté des pneus qu’ils ont fait brûler. Puis deux groupes armés sont intervenus. Un groupe a bloqué les sorties pendant qu’un autre incendiait le bâtiment de l’intérieur. Ils étaient habillés de tenues spéciales prévues pour résister aux flammes et portaient des masques à gaz. D’ailleurs, le journaliste explique que tout d’abord une fumée intense impossible à respirée s’est diffusée dans le bâtiment, puis le feu à pris et la fumée du feu s’est à son tour diffusée, poussant les gens à aller sur le toit se réfugier.
Oleg Rechetniak raconte ce qu’il a vécu: Tout d’abrd la fumée qui venait de la rue et il a vu les pneus brûler. Ensuite, il a voulu voir ce qui se passait et on lui criait de ne pas ouvrir la porte car c’était irrespirable. Il est quand même descendu et là il entendait en bas vers la sortie les gens crier, prisonniers du bâtiment, de les laisser sortir, qu’ils ne pouvaient plus respirer. Des forces de l’ordre supplémentaires qui avaient été mises en place pour soi-disant protéger Inter d’une provocation finalement les bloquait. Tout d’un coup, une fumée noire intense les a plongé presque dans l’obscurité, alors que personne n’avait éteint la lumière. Finalement, avec de petites lampes de poche, s’aidant les uns les autres, ils se sont dirigés vers le toit.
Tout parallèle avec Odessa est à exclure, il serait trop évident. <
Pour ce qui concerne le contexte. Quelques jours avant les faits, Avakov, ministre de l’intérieur, a demandé au SBU (les services secrets ukrainiens) de lancer une enquête sur la chaîne Inter, en raison de ses positions “antigouvernementales”. Dès mercredi, sur le site bien connu Mirotvorets qui publie la liste des personnes dérangeantes dont le pouvoir doit se débarrasser, notamment les journalistes, des menaces furent proférées contre la chaîne. Ces incitations ont été reprises par différentes personnes politiques au pouvoir. Selon Timoshenko, cet acte a eu l’aval des très hauts personnages.<
Le lendemain des faits, de nouvelles tentes sont installés et à nouveau des pneus sont apportés. Comme l’écrit le journaliste de Radio Svoboda, qui ne semble pas du tout s’inquiéter de l’atteinte portée à la liberté de parole. Radio Svoboda, radio liberté en traduction. Quelle liberté?
Karine Bechet-Golovko
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